On appelle le Continuation Bet, ou C-bet, le fait de miser au flop après avoir été l’agresseur préflop, et cette action qui semble simple en surface recèle une grande stratégie…
Si vous n’avez encore jamais eu l’occasion d’utiliser cette technique, nous vous proposons des méthodes pour l’utiliser selon la force de votre main, le profil des autres joueurs, et d’autres spécificités propres au C-bet. Que vous soyez un joueur débutant ou plus expérimenté, ces conseils vous permettront d’affiner votre jeu.
Quand utiliser le Continuation Bet au poker ?
Le Continuation Bet peut être utiliser avec toutes les mains. Si le C-Bet peut s’appliquer en priorité avec une main forte, vous pouvez aussi la jouer avec une main moyenne ou une main faible :
Utiliser le C-bet avec une main forte
Dans le cadre d’un C-bet, une main forte au poker se définit comme une paire supérieure ou mieux sur le flop comme un A ♠️ et K ♣️ et un flop qui tombe à K ♥️, 7 ♦️, et 2 ♠️. Statistiquement, les joueurs ont plus de chances de gagner avec un C-bet sur des flops forts entre 75% et 85% du temps.
Si vous débutez au poker, il est plus judicieux d’utiliser le C-bet systématiquement avec une main forte entre 1/2 et 3/4 du pot pour le construire et en extraire le plus de valeur. Pour rendre leur jeu moins lisible, certains joueurs de poker professionnels comme Daniel Negreanu n’hésitent pas à faire varier la taille de leurs C-bets avec des mains fortes, parfois en ne misant que 1/3 du pot ou aussi gros que le pot entier.
Phil Ivey, dans un autre registre, a utilisé un C-bet de 60% du pot en 2019, avec un set de rois sur un flop K ♠️, 7 ♥️, et 2 ♦️, induisant son adversaire en erreur sur la force réelle de sa main.
Utiliser le C-bet avec une main moyenne
Une main moyenne est typiquement une paire moyenne ou faible sur le flop, ou une main avec un bon potentiel d’amélioration comme un tirage ouvert pour réaliser un C-bet. Cela peut correspondre à Q ♥️ et J ♥️ sur un flop de 9 ♠️, 8 ♦️, et 3 ♣️.
Le taux d’un C-bet avec une main moyenne étant de 60% à 70% avec une taille de mise standard d’environ 1/2 pot, cette stratégie est souvent adoptée par les débutants. Les joueurs professionnels, comme Tom Dwan, sont connus pour utiliser des C-bets plus petits d’environ 1/3 du pot avec des mains moyennes, ce qui leur permet de contrôler la taille du pot.
Lors du WSOP Main Event de 2024, Fedor Holz a notamment utilisé un C-bet de 40% du pot avec Q ♠️ et J ♠️ sur un flop T ♥️, 9 ♣️, et 3 ♦️. Cela lui a permis de continuer à représenter une main forte, tout en gardant le pot sous contrôle.
Utiliser le C-bet avec une main faible
Une main faible est une main qui n’a pas touché le flop et a peu de potentiel d’amélioration dans le cadre d’un C-bet, comme A ♣️ et K ♠️ sur un flop 9 ♥️, 7 ♦️, et 2 ♣️.
Pour maximiser le fold equity, c’est à dire les chances que l’adversaire se couche, les débutants peuvent réaliser un C-bet avec des mains faibles d’environ 40 à 50% du temps, en utilisant une taille de mise légèrement plus importante de 2/3 du pot. Cela s’explique par le fait que le taux moyen de succès d’un C-bet avec une main faible est de 35% à 40% contre un adversaire, avec un taux qui diminue selon le nombre de joueurs.
Pour les meilleurs joueurs de poker français et les professionnels, la stratégie peut être plus équilibrée. Doug Polk a pour habitude d’ajuster son taux de C-bet avec des mains faibles selon la texture du flop et le profil de l’adversaire. Il peut aller jusqu’à un C-bet seulement 30% du temps sur certains flops qui lui sont défavorables.
Lors de l’EPT Barcelone de 2024, Liv Boeree a utilisé un C-bet de 75% du pot avec A ♥️ et K ♦️ sur un flop de T ♠️, 7 ♣️ et 2 ♥️. Cela lui a permis de faire folder son adversaire qui a abandonné sa paire moyenne.
Comment utiliser le Continuation Bet pour bluffer au poker ?
Vous pouvez utiliser le Continuation Bet pour bluffer au poker dans les jeux à cartes communes comme le Texas Hold’em. Cela consiste à miser avec une main faible pour faire croire à l’adversaire que vous avez une main forte, dans le but de le faire folder.
Le C-bet doit être utilisé avec prudence pour les joueurs débutants, principalement sur des flops dry ou « secs », c’est à dire des flops sans tirages évidents. Sur un flop de 2 ♠️, 5 ♣️, et 9 ♦️, un débutant peut réaliser un C-bet avec une main comme A ♥️ et K ♠️ qui n’a pas touché le flop, sachant que la taille de mise recommandée dans ce cas est d’entre 1/2 et 2/3 du pot.
La fréquence et la taille du C-bet peut varier, mais cela est davantage réservé aux joueurs avec plus de maturité. Cela demande d’analyser la texture du flop, la position, et le profil des autres joueurs. Tom Dwan, connu pour son style agressif, pourrait utiliser un C-bet plus petit (environ 1/3 du pot) sur un flop comme A ♠️, 7 ♦️, et 2 ♣️ avec une main comme 8 ♥️ et 9 ♥️. Cela lui permettrait d’exploiter le fait que ce flop favorise son range de relance préflop.
Quand éviter d’utiliser le Continuation Bet ?
Si certains joueurs de poker n’hésitent pas à prendre des risques dans les cas suivants, il est déconseillé d’utiliser le Continuation Bet si plusieurs adversaires suivent, contre les joueurs qui payent systématiquement, ou si vous êtes hors position.
Ne pas utiliser le C-bet si plusieurs adversaires suivent
Le C-bet est moins efficace contre plusieurs adversaires, car la probabilité que l’un d’eux ait touché le flop augmente significativement. Le succès d’un C-bet est statistiquement réduit de 20% à 25% pour chaque joueur supplémentaire dans le pot.
Si vous débutez au poker, une règle simple consiste à éviter de réaliser un C-bet lorsque plus de deux joueurs ont suivi la relance préflop. Si vous avez A ♠️ et K ♦️ et que vous relancez préflop, avec trois joueurs qui suivent, un C-bet sur un flop 7 ♣️, 5 ♥️, et 2 ♠️ a peu de chances de faire abandonner tous les adversaires.
Dans le cas d’un C-bet « multiway », c’est à dire avec plusieurs adversaires, les professionnels comme Daniel Negreanu adaptent leur stratégie en réduisant leurs fréquences de mise.
Ne pas utiliser le Continuation Bet contre des joueurs qui payent tout le temps (calling station)
Un « calling station » est un joueur qui suit (call) fréquemment, même avec des mains marginales, ce qui rend le Continuation Bet peu contre ce type de joueur, le taux de réussite étant réduit de 30%.
Avec Q ♥️ et J ♥️ sur un flop 8 ♠️, 6 ♣️, et 3 ♦️, un Continuation Bet contre un calling station sera souvent payé, même si l’adversaire n’a rien touché, ce qui rend cette stratégie sans effet pour un débutant.
Un professionnel comme Phil Ivey aurait tendance à changer sa stratégie contre les calling stations en réduisant son bluff et en misant plus pour la valeur. Il pourrait par exemple utiliser un Continuation Bet plus gros de 3/4 à un pot complet.
Ne pas utiliser le C-bet en étant hors de position
Être « hors de position » signifie agir avant son adversaire, ce qui est désavantageux, car vous manque d’informations sur ses intentions. Les joueurs en position gagnent en moyenne 60% à 70% plus de pots que ceux hors de position, ce qui veut dire que vous avez tout intérêt à développer votre stratégie de C-bet en conséquence.
Pour augmenter leurs chances de réussite, les débutants peuvent réduire leur fréquence de C-bet hors de position de 40 à 50% au lieu des 60 à 70% habituels. Si vous relancez depuis la position « UTG » (Under The Gun), c’est à dire la première position à agir, avec A ♣️ et Q ♣️ et que le bouton suit, un C-bet sur un flop K ♠️, 7 ♥️, et 2 ♦️ est risqué, car vous n’avez pas l’avantage de la position.
Vous pouvez également vous inspirer des stratégies de certains professionnels comme Tom Dawn qui réduisent aussi leurs C-bet hors de position, mais de manière plus nuancée. Tom Dawn pourrait par exemple réaliser un C-bet plus petit, d’1/3 du pot, avec des mains faibles et moyennes pour garder le pot petit, et plus gros de 3/4 du pot avec des mains fortes pour maximiser sa valeur.
Comment améliorer ses Continuations Bet : les stratégies
Pour améliorer vos Continuations Bet, vous pouvez utiliser un C-bet quand le flop est fort, ou quand vous avez bien lu la main d’un autre joueur :
Utiliser le C-bet lorsque le flop est fort
Un flop fort se définit par un flop qui favorise votre range de mains préflop, c’est à dire l’ensemble des mains avec lesquelles vous auriez relancé avant le flop. 75% à 80% des C-bet sont réussis grâce aux flops forts, car un joueur ne trouve qu’une paire ou mieux une fois sur trois au flop.
Si vous manquez d’expérience, concentrez-vous sur les flops qui contiennent des cartes hautes, particulièrement ceux avec un As. Si vous avez relancé préflop avec A ♠️ et K ♦️ et que le flop tombe A ♣️, 7 ♥️, et 2 ♠️, c’est une excellente opportunité pour un C-bet car il favorise votre range de relance préflop.
Vous pouvez avoir une approche plus stratégique, comme certains joueurs de poker professionnels qui utilisent des C-bets de taille variable sur les flops forts pour équilibrer leur range. Sur un flop A ♣️, 7 ♥️, et 2 ♠️, un C-bet d’1/3 du pot avec des mains faibles comme K ♠️ et Q ♦️ et de 3/4 du pot avec des mains fortes comme A ♠️ et K ♦️peuvent rendre le jeu moins lisible.
Utiliser le C-bet quand vous avez bien lu la main de votre adversaire
La lecture de jeu est une compétence dont vous avez impérativement besoin pour optimiser vos C-bets. Cela consiste à analyser le comportement et les tendances de jeu de votre adversaire pour estimer la force de sa main. Un bon « Fold to Continuation Bet » se situe généralement entre 42% et 57% aux limites basses pour les bons joueurs. Si votre adversaire a un pourcentage supérieur, vous pouvez augmenter la fréquence de vos C-bets contre lui.
Les joueurs débutants peuvent s’exercer en se concentrant sur les « tells » évidents, c’est à dire les comportements des adversaires qui révèlent leur jeu. Si vous avez observé qu’un adversaire se couche souvent face aux C-bets sur des flops sans As ou Roi, c’est une excellente opportunité pour un C-bet. Avec Q ♥️ et J ♥️ en position tardive et une relance préflop, un joueur « tight », c’est à dire qui joue peu de mains, peut suivre en grosse blinde. Si le flop tombe 9 ♠️, 8 ♦️, et 3 ♣️, c’est une situation idéale pour un C-bet, car le flop a probablement manqué la range de votre adversaire.
La lecture de jeu est beaucoup plus sophistiquée chez les professionnels. Certains d’entre eux sont connus pour modifier leurs C-bets en fonction des tendances chez les adversaires qu’ils ont pu observer sur de nombreuses mains. Ils peuvent aussi utiliser des outils statistiques « Heads-Up Display » (ou HUD) pour affiner leur lecture. Si un adversaire a un « Fold to Flop C-bet », c’est à dire un pourcentage de fois où il se couche face à un C-bet au flop, de 60%, c’est une excellente cible pour des C-bets fréquents.
Conclusion
Maîtriser le Continuation Bet est bien plus compliqué qu’il n’y paraît, car cela nécessite une analyse permanente du jeu. Les joueurs les plus redoutables au poker n’hésitant pas à utiliser les C-bets, vous devrez notamment adopter des stratégies différentes au cours du jeu.
Bien que cette stratégie ait plus de chances de fonctionner dans certaines situations, le poker étant un jeu de hasard, rien ne peut garantir que votre Continuation Bet soit un succès.